L'évaluation de l’état chimique des eaux souterraines au point consiste à déterminer, pour un ensemble de polluants (pesticides, polluants d'origine industrielle, produits pharmaceutiques...), si sont constatés des dépassements de la valeur seuil nationale (ou norme de qualité européenne ou valeur seuil bassin liée au fond hydrogéochimique). Deux valeurs caractéristiques sont calculées (moyenne des moyennes annuelles et fréquence de dépassement des concentrations) puis comparées aux différentes valeurs seuils existantes. Cette évaluation conduit à deux états possibles : bon état (couleur bleue) ou état médiocre (couleur rouge).
Par rapport aux états constatés en 2014, 2015 et 2016, le pourcentage de stations en état médiocre est un peu plus élévé depuis 2017. Cette augmentation du nombre de stations en état médiocre par rapport aux années précédentes peut s'expliquer par :
la recherche systématique de « pesticides » sur toutes les stations de suivi RCS en application de l’arrêté du 7 août 2015 ;
et l'ajout de la recherche de métolachlore OXA et ESA dans la liste des pesticides recherchés.
Sur le bassin Rhône Méditerranée, entre 2014 et 2019, environ 80 % des points du réseau de contrôle de surveillance (RCS) ont présenté un bon état chimique. En 2019, 21,9% des stations RCS présentent un état médiocre (contre 24,6 % en 2018 et 24,1 % en 2017).
Les stations qui présentent un état chimique médiocre sont principalement situées sur des masses d’eau souterraines à risque de non atteinte des objectifs de bon état chimique. Elles appartiennent donc de fait au contrôle opérationnel (CO).
Concernant plus particulièrement le CO, environ 50 % des stations ont présenté un état chimique médiocre entre 2014 et 2019. A partir de 2017, le nombre de stations CO en mauvais état est en légère augmentation (48.4 % en moyenne sur les années 2014, 2015 et 2016 contre 54.7 % en moyenne sur les années 2017, 2018 et 2019), en lien avec la recherche de nouvelles substances.
Sur le bassin de Corse, tous les points appartiennent au RCS et sont globalement en bon état chimique.
Deux points présentent un état chimique médiocre :
- Le forage d'Osani, situé sur la côte ouest de la Corse, apparait avec les sulfates comme paramètre déclassant. Les fortes concentrations sont majoritairement observées sur la période de avril-mai et les plus faibles sur le mois d'octobre. Ceci pourrait être dû à une intrusion saline d'origine naturelle, ou du fait des pompages pour les besoins en alimentation en eau potable.
- Le forage de Marchesacciu, sur la côte ouest, a présenté une concentration importante en uranium sur un unique prélèvement au cours des 6 dernières années. Cette concentration isolée ne permet pas de conclure à un mauvais état des eaux de ce forage.
ETAT NO3 : Nitrates - ETAT PEST : Pesticides - ETAT COHV : Composés Organo-Halogénés Volatils - ETAT AUTRES : Autres substances organiques
Remarque: les chiffres entre parenthèse correspondent aux numéros de secteurs individualisés sur la carte précédente.
La situation vis-à -vis des nitrates est sensiblement la même que les années précédentes. Sur les 695 stations de suivi des nitrates, 59 ont présenté un état chimique médiocre pour ce paramètre, soit environ 8,5 %.
Très solubles dans l’eau, les nitrates peuvent constituer une cause majeure de pollution des eaux souterraines. Les nitrates dans les eaux souterraines sont issus majoritairement d’effluents d’élevage et d’apports excessifs d’engrais azotés aux cultures. Les teneurs les plus élevées sont enregistrées dans les secteurs caractérisés par des activités agricoles intensives.
Sur le bassin Rhône-Méditerranée, les principaux secteurs concernés par un état chimique médiocre du fait de concentrations excessives en nitrates sont :
en Bourgogne Franche Comté et Grand Est : les calcaires jurassiques du Châtillonnais (1) ;
en Auvergne Rhône Alpes : les couloirs fluvio-glaciaires de l’Est lyonnais et la basse plaine de la Bourbre (2 – 3), les alluvions quaternaires et molasses miocènes dans la région de Valence (4) ;
en Provence Alpes Côte d’Azur : la plaine de l’Eygoutier (6), le plateau de Valensole (7), la molasse miocène du bassin de Carpentras (8) et la plaine de Berre (9) ;
en Occitanie : les plaines de Mauguio-Lunel et de la Vistrenque (10).
Les pesticides (ou produits phytosanitaires) sont utilisés pour protéger les végétaux contre les organismes nuisibles. Majoritairement d’origine agricole, les pesticides dans les eaux souterraines peuvent également provenir d’activité non agricole comme le jardinage amateur, l’entretien des voiries et espaces verts et de certains secteurs industriels.
Des résidus de produits phytosanitaires, c’est-à -dire aussi bien de leurs substances actives que de leurs produits de dégradation, se retrouvent à l’échelle du bassin sur environ deux tiers des stations de mesure.
Sur les 639 stations disposant de données pesticides, 206 stations, soit un peu plus de 32 %, ont présenté un état chimique médiocre du fait de la présence de pesticides à des teneurs supérieures aux normes de potabilité (0,1 µg/l par substance et 0,5 µg/l pour le total des substances).
La contamination des eaux souterraines par les pesticides est beaucoup plus étendue que celle des nitrates. Parmi les secteurs identifiés avec des déclassements par les nitrates, seule la plaine de l’Eygoutier (6) n’est pas concernée par des déclassements pesticides. Par ailleurs, seules les zones montagneuses du bassin, exemptes d’agriculture intensive sont indemnes de contamination pesticides. 78,6 % des points en état chimique médiocre le sont à cause des pesticides.
Les substances responsables du plus grand nombre de déclassements sont des métabolites issues de la dégradation de substances actives. Le produit de dégradation du S-métolachlor (métolachlore ESA), recherché uniquement depuis 2017, apparait comme la principale substance à l’échelle du bassin à l'origine d'un état chimique médiocre avec environ 16 % des stations suivies. Toutefois, cette substance ne présente des déclassements que dans les régions du nord du bassin (Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne-Rhône-Alpes), sur des territoires occupés en majorité par des grandes cultures de maïs, principalement :
en Bourgogne Franche Comté et Grand Est : sur les plateaux calcaires de Haute-Saône (11) et le Val de Saône (12) avec les cultures de céréales ;
en Auvergne Rhône Alpes : sur le plateau plioquaternaire Dombes-Sud (13), les couloirs fluvio-glaciaires de l’Est lyonnais et la basse plaine alluviale de la Bourbre (2 - 3), les formations quaternaires et molassiques du bas Dauphiné Nord Isère (4), les formations quaternaires de Bièvre-Valloire (14) et de la plaine de Valence (5) avec les cultures de céréales et d’arbres fruitiers.
12 % des déclassements sont ensuite dus à la somme des pesticides. Puis, à l’instar des années précédentes, l’atrazine déséthyl déisopropyl, produit de dégradation de l'atrazine, reste une des principales substances déclassantes (avec 11,5 % des stations suivies).
Recherchés uniquement depuis 2018, les produits de dégradation du métazachlore, les métazachlores ESA et OXA (substances persistantes et mobiles) apparaissent également en tête des substances à l'origine du mauvais état à l'échelle du bassin. Comme pour le S-métolachlore, les déclassements sont principalement localisés dans le Nord du bassin (Bourgogne-Franche-Comté et Grand-Est) et dans une moindre mesure en Auvergne-Rhône-Alpes.
En dehors des zones de grandes cultures, la présence de produits phytosanitaires prédomine dans les régions viticoles telles que :
Les déclassements dus à l’oxadiazon se situent uniquement sur ou en aval de zones industrielles : nappe du Drac – rive droite en aval de la confluence avec la Romanche (agglomération de Grenoble) et nappe du Rhône - plaine de Péage-de-Roussillon.
A noter également la spécificité du plateau de Valensole (7), où la principale substance déclassante reste le 2-6, dichlorobenzamide (produit de dégradation du diclobénil anciennement utilisé sur la lavande et aujourd’hui interdit d’utilisation).
L’exemple de l’atrazine montre bien qu’en dépit de l’interdiction d’utilisation de certaines matières actives depuis plusieurs années, leurs produits de dégradation, dont la toxicité peut être supérieure à la molécule mère, seront encore présents dans les eaux souterraines durant de nombreuses années.
Remarque : l'évaluation de l'état chimique des eaux souterraines prend en compte l'ensemble des substances pesticides recherchées et leurs métabolites dits pertinents, et non une liste finie de substances comme c'est le cas par exemple pour les cours d'eau.
(+) Substances interdites (++) Produits de dégradation de substances interdites (+++) Substances autorisées
Ce suivi est réalisé sur 185 points. Ces points appartiennent majoritairement au CO et sont localisés sur ou en aval de zones industrielles et/ou urbaines.
Les déclassements sont principalement dus à la présence de trichloroéthylène et tétrachloroéthylène. La présence de solvants chlorés dans l’environnement est uniquement d’origine anthropique. Ils sont principalement utilisés en tant que dégraissant, détergent et solvant dans l’industrie chimique.
Les nappes contaminées sont principalement situées au niveau de l'agglomération de Dijon, dans le secteur de Tavaux (au Sud-Ouest de Dole), sur la nappe du Rhône au niveau de l’agglomération lyonnaise, sur les alluvions du Drac et de la Romanche sous l'influence des activités industrielles de Jarrie et Pont-de-Claix (agglomération de Grenoble) et sur la nappe de la Durance moyenne en aval de Château-Arnoux.
Les hydrocarbures aromatiques polycycliques ou HAP sont répandus dans l’environnement et proviennent en grande majorité de la combustion des énergies fossiles (charbon, pétrole) et du bois.
Au total, les HAP ont été recherchés sur 619 stations. Une dizaine de stations présente un état médiocre principalement à cause de la présence de benzo(a)pyrène. Les contaminations sont observées majoritairement dans le nord du bassin.