Les macrophytes regroupent l'ensemble des végétaux aquatiques visibles à l'oeil nu. Ils sont étudiés au niveau de plusieurs unités d'observations (UO) positionnées sur les différents types de rives du plan d'eau afin de disposer d'une image représentative du peuplement macrophytique. Le nombre d'UO étudiées est fonction de la superficie du plan d'eau : généralement de 3 à 8 UO par plan d'eau. Sur chaque UO, deux types de relevés floristiques sont réalisés :
Un relevé de la zone littorale permettant d'inventorier la zone peu profonde du plan d'eau : il correspond à la prospection d'une bande de 100 mètres de long, parallèle à la rive et pouvant s'étendre jusqu'à 1 mètre de profondeur ;
Trois profils perpendiculaires à la rive, distants de 50 mètres chacun, de minimum 20 m et maximum 100 m de long où sont effectuées 30 recherches de macrophytes (points contacts) réparties de manière régulière le long des transects. Ces profils permettent d'étudier la zone profonde du plan d'eau, abritant les espèces purement aquatiques.
Cette méthode d'échantillonnage correspond à l'application de la norme NF T90-328 et s'applique aux plans d'eau faiblement marnants (inférieur à 2 m de marnage).
L'évaluation de cet élément de qualité repose sur l'Indice Biologique Macrophytique en Lac (IBML) constitué à ce jour d'une métrique. Il exprime un niveau de "dégradation globale" du peuplement macrophytique du plan d'eau.
Les valeurs IBML de 2022 et des suivis antérieurs
MEA : Masse d'Eau Artificielle.
MEFM : Masse d'Eau Fortement Modifiée.
Indices calculés avec le SEEE (V1.0.1)
Plus l’indice IBML tend vers 1, plus l’élément de qualité macrophytique s’apparente au très bon état.
Qualification : la qualification de la donnée est le niveau de confiance qu’un opérateur a dans la conformité d'un résultat (Correcte/Incertaine/Incorrecte)
L'IBML s'applique aussi bien aux plans d'eau naturels qu'aux plans d'eau d'origine anthropique (quand cet élément de qualité est jugé pertinent). Cependant, les valeurs obtenues sur les plans d'eau d'origine anthropique (cas des retenues de l'Allement, Cize-Bolozon, Coiselet, de la retenue du Salagou et de la gravière des Eaux-Bleues en ce qui concerne le suivi 2022) ne sont pas utilisées pour évaluer le potentiel écologique des MEA/MEFM, selon les dispositions de l'arrêté "Evaluation" de juillet 2018 : il s'agit dans ce cas d'un outil complémentaire d'aide au diagnostic.
Les 7 lacs naturels ayant pu faire l'objet d'un suivi affichent un état macrophyte compris entre l'état moyen et le très bon état (pour rappel, le suivi macrophyte de l'étang d'Entressen a été annulé en raison du marnage exceptionnel du plan d'eau en 2022, exondant les roselières) :
Les deux grands lacs naturels alpins suivis en 2022 (Annecy, Bourget), le lac de Chalain dans le Jura et le lac de Pierre-Châtel, situé sur le plateau Matheysin, au sud de Grenoble, en Isère, sont tous classés en très bon état pour ce compartiment biologique. Pour Annecy et le Bourget, le résultat fourni par l'indicateur IBML est conforme aux précédents suivis et souligne le très bon état du compartiment macrophytique de ces plans d'eau. Concernant les lacs de Chalain et de Pierre-Châtel, il est très intéressant de constater que l'amélioration du peuplement macrophytique relevée lors du précédent suivi de 2019 semble se confirmer en 2022. Ainsi le développement de la végétation lacustre constaté sur le lac de Chalain lors des précédents suivis se maintient avec la présence de characées jusqu'à plus de 8 mètres de profondeur. L'identification d'une characée (Chara Contraria) de profil écologique élevé sur l'ensemble des secteurs étudiés en 2019 (alors que celle-ci était cantonnée uniquement sur certains sites d'études lors des précédents suivis) a été de nouveau constatée en 2022. Son implantation semble même s'être étendue puisqu'elle a été identifiée sur 85 points contacts en 2022 contre 52 en 2019 (une trentaine en 2010 et 2016).
De la même manière sur le lac de Pierre-Châtel, les herbiers de characées à Chara Contraria dont le développement avait été notable en 2019 (70 points contacts sur 2 UO), se sont maintenus et encore étendus en 2022 (127 points contacts sur 3 UO). Une autre characée (Chara intermedia), également de cote spécifique élevée, et contactée de manière anecdotique pour la première fois en 2019 (2 points contacts sur 2 UO) a été de nouveau retrouvée en 2022 (10 points contacts sur 3 UO). Il sera intéressant de surveiller si son implantation, encore fragile, est confirmée lors des prochains suivis.
Le lac de Nantua, dans l'Ain, affiche un bon état pour l'élément de qualité macrophytes, dans la lignée des précédents suivis réalisés. Ce plan d'eau affiche cependant une grande pauvreté de végétation. Ainsi, au-delà de 1 mètre de profondeur, aucune végétation n'est observée. Les caractéristiques naturelles de ce lac aux pentes abruptes, à la profondeur relativement importante et au substrat rocheux, caillouteux, ne sont toutefois pas propices à l'implantation de macrophytes et peuvent expliquer ce constat. Ce sont ainsi essentiellement des algues et des bryophytes qui constituent la végétation inventoriée au sein de ce lac.
Les lacs de l'Abbaye et du Val dans le Jura sont tous deux classés en état moyen pour l'élément de qualité macrophytes. Dans le cas du lac de l'Abbaye, il s'agit de la première année de suivi où l'évaluation du peuplement macrophytique n'atteint pas au moins le bon état. La valeur de l'indicateur IBML (0.591) reste cependant assez proche du seuil séparant les états bon et moyen (0.6) et le peuplement observé a peu évolué comparativement aux derniers suivis réalisés depuis 2010. Ainsi, la végétation strictement aquatique reste peu présente, les characées ne sont que très ponctuellement observées sur les différents sites d'études. Le développement sensiblement plus important du myriophylle en épis (cote spécifique IBML de 8/20) lors du suivi 2022 (contacté sur 20 points contacts et 3 UO contre de 1 à 7 points contacts sur 1 à 3 UO sur les suivis précédents) peut expliquer le léger recul de la valeur de l'IBML en 2022. Son évolution sera à surveiller lors des prochains suivis.
L'état moyen obtenu sur le lac du Val est conforme aux évaluations pécédentes. Ces résultats avaient été qualifiés d'incertains lors des deux précédents suivis puisqu'en décalage avec les résultats obtenus pour les autres éléments de qualité biologiques et physico-chimiques et en l'absence de pressions identifiées pouvant expliquer l'altération apparente de ce compartiment biologique. En effet, dans ce lac naturel du Jura relativement préservé, il est étonnant que le peuplement macrophytique n'atteigne pas au moins le bon état. L'interprétation des résultats des relevés de végétation réalisés en 2022 ( Cf. rapports annuels en ligne sur le SIE) relève à nouveau cette incohérence et l'absence de végétation strictement aquatique dans ce lac naturel comportant pourtant deux grandes beines lacustres propices à leur installation. Une hypothèse de nouveau avancée dans le rapport annuel serait que cette absence de végétation soit la conséquence de la forte densité d'écrevisses signal observée dans le plan d'eau (espèce invasive originaire du nord-ouest des États-Unis, introduite dans les années 70), les adultes se nourissant en majeure partie de végétaux. "Le rétablissement d'un équilibre écologique plus conforme aux potentialités de ce lac passerait alors par l'éradication de cette espèce", selon le bureau d'études en charge du suivi. Le suivi piscicole réalisé en 2022 par l'OFB sur le lac du Val souligne également la croissance importante de cette espèce au fil des suivis (Cf. Annexe 7 du rapport annuel).
Concernant les plans d'eau d'origine anthropique suivis sur le volet macrophytes en 2022 :
Les retenues de Cize-Bolozon, Coiselet (toutes deux en continuité sur la rivière d'Ain) et la gravière des Eaux-Bleues, intégrée au Grand Parc de Miribel Jonage, en région lyonnaise, atteignent au moins le bon état. La retenue de Cize-Bolozon est même évaluée en très bon état pour cet élément de qualité biologique mais ce résultat paraît surévalué du fait de la prise en compte, parmi les UO inventoriées, d'un secteur de hauts-fonds abritant des herbiers continus de characées (dont Chara Contraria) à cote spécifique élevée. Cette configuration de rive restant assez peu représentée sur ce plan d'eau implanté dans un secteur de gorges au fond souvent abrupt, la valeur de l'IBML peut être quelque peu surévaluée.
La retenue du Coiselet, localisée légèrement plus en amont sur l'Ain, présente des développements localement importants de macrophytes au niveau des secteurs propices à leur implantation. Ils expriment un fort niveau trophique avec la présence d'herbiers assez denses d'espèces potentiellement envahissantes, comme l'Elodée de Nuttall mais également Nitellopsis obtusa, characée autochtone susceptible de former très rapidement des herbiers monospécifiques conséquents.
La gravière des Eaux-Bleues présente une valeur d'IBML légèrement supérieure à celles obtenues sur les deux précédents suivis ce qui lui permet d'être en bon état pour l'élément de qualité macrophytes sur le suivi 2022. Le peuplement observé sur les différentes années est assez semblable mais le retrait de l'espèce eutrophile Nitellopsis obtusa constaté en 2022, au profit de Chara globularis, plus méso-eutrophile, associé à l'identification de Chara intermedia (certes très peu représentée) et au maintien de Chara contraria, deux espèces méso-oligotrophes, peut expliquer cette hausse de l'indicateur. Ce plan d'eau de faible profondeur s'illustre par un développement macrophytique très important conduisant à réaliser des opérations de faucardage pour limiter la gêne sur les usages du plan d'eau (activités nautiques).
La retenue d'Allement, la plus en aval de la chaîne des retenues de l'Ain, ainsi que la retenue du Salagou, dans l'Hérault, affichent un état moyen. Pour cette dernière, la note indicielle se rapproche de l'état médiocre. Ce plan d'eau présente un peuplement macrophytique de profil eutrophe, avec de nombreuses espèces exotiques envahissantes dont le Lagarosiphon major, implanté sur l'ensemble des UO étudiées (6 UO sur ce plan d'eau) et constituant l'espèce majoritaire du plan d'eau. Une autre espèce exotique envahissante, nouvellement découverte en France en 2022 justement sur le lac de Salagou (Dutarte et al., 2022), est également bien implantée, il s'agit de Vallisneria australis, constituant des herbiers assez denses sur 3 UO. Cette nouvelle espèce n'est pas considérée dans le calcul de l'IBML.
Pour 4 de ces plans d'eau (Allement, Cize-Bolozon, Coiselet, Salagou), il s'agit du premier suivi macrophytes réalisé dans le cadre du programme de surveillance selon le protocole applicable aux plans d'eau naturels ou anthropiques peu marnants. En effet, la révision de la typologie nationale des plans d'eau (arrêté du 19 avril 2022 relatif aux méthodes et aux critères à mettre en oeuvre pour délimiter et classer les masses d'eau) et de l'arrêté définissant la "Surveillance" (arrêté du 26 avril 2022), a conduit à considérer comme pertinent cet élément de qualité biologique pour ces plans d'eau.